Autour des mains

Comment soulager des douleurs aigües dues à des calcinoses situées au bout des doigts, à fleur de peau ? Existe-t-il des crèmes antalgiques locales, ou autres traitements médicamenteux ?

On cherche le traitement des calcinoses depuis cinquante ans et, pour l’instant, à part la chirurgie, on n’a pas trouvé grand-chose. Si la calcinose se surinfecte, un traitement antibiotique est utile, le plus souvent les germes en cause sont les staphylocoques de la peau et par conséquent pristinamycine, oxacilline, fucidine, rifampicine sont parmi les molécules utilisables.

Les traitements antidouleurs sont efficaces, mais pas longtemps, donc il faut les renouveler souvent (ex. paracétamol = 4 à 6h, tramadol = 8h, aspirine = 4 à 6h, codéine et dérivés opiacés = 4 à 12h selon les produits). Les crèmes antidouleur locales (Algésal° Voltarène Emulgel°, Versatis°) peuvent être utiles.

On considère que les traitements de fond de la sclérodermie, notamment les inhibiteurs calciques, le méthotrexate, l’hydroxychloroquine, les vasodilatateurs, contribuent à réduire la formation de calcinoses, car celles-ci sont au départ des précipitations de calcium sur des zones de tissus ischémiques, c’est-à-dire mal irriguées à cause de la sclérodermie.

Quelle est la différence entre calcinose et calcifications ? 

Calcinose et calcification sont synonymes. S’il y a un doute diagnostic, ce sont de petits amas de calcium qui sont très faciles à voir sur les radios des mains. Ils peuvent rester quiescents, mais parfois ils s’éliminent à travers la peau sous forme d’une boue crayeuse et à cette occasion ils peuvent s’infecter avec les microbes de l’extérieur ; cela provoque de façon assez caractéristique un écoulement de pus jaune et des manifestations inflammatoires locales (douleur, rougeur, chaleur locales) qui méritent un traitement antibiotique dirigé vers les staphylocoques (Orbénine, Bristopen, Pyostacine, Fucidine, ou autre).

Dans tous les cas, ce sont des problèmes de peau qui témoignent de la mauvaise irrigation due à la sclérodermie et leur cicatrisation est lente, les pansements doivent être souvent conservés longtemps.

Un Raynaud devient-il forcement une sclérodermie ?

Non, la très grande majorité des personnes atteintes de syndrome de Raynaud n’aura jamais de sclérodermie.

Chez la femme, le phénomène de Raynaud est le plus souvent isolé et primitif, dans un bon nombre de cas, il s’atténue et peut disparaître. 

Chez l’homme, les causes les plus fréquentes sont des maladies professionnelles.

Cependant, le phénomène de Raynaud peut être le premier signe de sclérodermie ce qui justifie son dépistage systématique par des examens simples, mais dans la grande majorité des cas, les examens seront négatifs…

A quoi sert l’iloprost ?

C’est un produit capable de fermer des ulcérations sclérodermiques, qui a une efficacité supérieure quand on l’administre à la carte et non pas systématiquement. Les effets indésirables sont importants, il doit donc être donné en milieu hospitalier.

L’iloprost n’a pas d’effets musculaires connus, c’est un pur dilatateur de vaisseaux avec un effet antiplaquettaire, sans plus. Les maux de tête et rougeurs de peau qui sont classiques au cours de la perfusion disparaissent en cinq minutes à la fin de celle-ci.

Que peut-on faire contre la sclérodactylie ?

Sur la sclérodactylie, il n’y a pas de traitement miracle mais la kiné, la protection du froid, les médicaments pour dilater les artères notamment les inhibiteurs calciques, éventuellement l’iloprost sont intéressants.

Comment éviter et traiter les ulcères récidivants aux doigts ?

Il faut rappeler à cette occasion :

  • le rôle aggravant du tabac, du froid, de l’amaigrissement, de la déshydratation, qui aggravent l’insuffisance artérielle ;
  • le rôle améliorant du chaud, des médicaments inhibiteurs calciques (nifedipine = Adalate° , nicardipline = Loxen°, amlodipine = Amlor° et autres molécules de la même classe), des vaso-dilatateurs (ilomédine°= iloprost) ;
  • il y a une présomption d’efficacité concernant le sidenafil (Viagra°, Revatio°) et le tadalafil (Adcirca°) qui sont aussi des médicaments dilatant les vaisseaux en bloquant la phosphodiestérase de type 5 ;
  • généralement, il n’y a pas d’indication à un geste chirurgical de revascularisation ou d’opération quelconque dans la sclérodermie, mais au cas par cas, cela peut être discuté, notamment si l’ulcération vient sur une calcinose ou sur une saillie osseuse qu’un chirurgien pourrait corriger ;
  • dans certains cas, il faut vérifier que les grosses artères du bras ou de l’avant-bras, voire du poignet ne sont pas obstruées partiellement ou totalement car cela aussi pourrait être traité ;
  • bien que des caillots de sang dans les artères puissent participer à l’obstruction de celles-ci, cela n’est généralement pas le cas dans la sclérodermie ; cependant dans certains cas des améliorations ont été publiées après traitement visant à dissoudre les caillots localement ;
  • enfin, il faudrait vérifier s’il n’y a pas, dans le sang, d’anomalie comme une protéine coagulant au froid (cryoglobuline) ou une autre anomalie qui prédisposerait à l’obstacle à l’écoulement du sang, qui pourrait être traitée ; le Rhémacrodex° a été remplacé par d’autre molécules pour améliorer la fluidité et le volume du sang comme le Plasmion° ou le Voluven°.

Bref, dans le cas d’ulcère récidivant à un doigt, je conseillerais une évaluation experte avec visualisation des artères et recherche de cryoglobulinémie, puis une intensification du traitement avec au moins perfusion d’ilomédine prolongée (jusqu’à 4 semaines).

Qu’en est-il du traitement des ulcérations par le caisson hyperbare ?

Il ne présente aucun intérêt dans le traitement de la sclérodermie. Il a été utilisé pour certains types de gangrène, mais même dans le traitement du pied diabétique, il n’a pas prouvé d’efficacité.

Est-ce que toute blessure même bénigne peut se transformer en ulcère ?

Il est évident que les mains des sclérodermiques sont fragiles, car il y a le problème vasculaire sous-jacent et que tout traumatisme aussi petit soit-il, qui cicatrisera très facilement chez n’importe qui, peut mettre plus de temps chez un sclérodermique.
C’est pourquoi, nous vous donnons tous des conseils de protection avec des gants, d’éviter le maximum de traumatismes sur vos mains : jardinage bricolage, brûlure, coupure, etc. peuvent entraîner une blessure qui peut devenir un ulcère digital. Je ne dis pas qu’il ne faut plus rien faire ; au contraire, mais en étant vigilant et en prenant des précautions !

Pourriez-vous nous dire un petit mot sur la prise en charge des calcinoses ?

C’est la problématique que nous avons le plus de mal à résoudre dans la sclérodermie. Les calcinoses surviennent chez 20 à 25% des patients. Elles se localisent le plus souvent sur la pulpe des doigts, mais peuvent survenir partout. Bien que l’on ne sache pas bien pourquoi et comment elles se forment, on sait cependant que ce sont les personnes qui présentent des problèmes vasculaires qui développent en principe ces calcinoses. Aujourd’hui, face à une calcinose, il n’existe pas de traitement qui va la faire disparaître de façon certaine. On utilise la Colchicine, la Dépénicillamine, les anti-coagulants… Mais aujourd’hui, aucun traitement n’a une efficacité démontrée sur les calcinoses. On essaie quelquefois certains traitements tout en restant prudent, car il ne faut pas qu’il y ait des effet secondaires trop importants. Ce qui est déterminant pour nous faire intervenir sur une calcinose est : y a-t-il une ulcération ? Est-ce que la peau est rompue et qu’il en sort soit une pâte qui ressemble à de la pâte à dentifrice, soit un caillot ? Et surtout y a-t-il une surinfection ? (souvent le signe d’une surinfection est lorsque ça bat dans le doigt la nuit) ? Et s’il y a des complications des calcinoses telles que des traumatismes répétées à cause de l’endroit où se situent les calcinoses, alors on demande à un chirurgien, prudent et expérimenté, de retirer le plus gros des calcinoses, mais pas tout car cela ne sert à rien, en espérant que les calcinoses ne réapparaîtront que le plus tard possible ou qu’elles ne réapparaîtront pas. Il faut surtout être très précautionneux et ne pas vouloir tout retirer, car ce n’est pas utile s’il n’y a pas de symptômes gênants pour le patient. Il n’y a pas longtemps nous avons eu un espoir avec un médicament appelé Thiosulfate de sodium( (sous forme de pommade) qui avait été testé pour les calcinoses auprès de personnes qui ont des hémodialyses (les dialysés chroniques insuffisants rénaux), mais les résultats ont été très décevants et il n’y a pas de démonstration que cela soit efficace.

Que faire pour les ongles déformés au bout des doigts ?

Parfois la déformation des ongles est due à des atteintes spécifiquement sclérodermiques de la troisième phalange : notamment si la pulpe ou l’os (la phalangette) de celle-ci a été réduite par des nécroses, l’ongle n’est plus soutenu par l’os et le tissu environnant et se courbe vers la face palmaire. Quelquefois il s’agit d’un champignon qui s’installe dans l’ongle et provoque un ternissement et un épaississement friable de celui-ci : un prélèvement au laboratoire d’un fragment permet de l’isoler et de décider d’un traitement local ou (si la matrice, la racine de l’ongle est atteinte) général. Couper et parer l’ongle, faire des soins des ulcérations des doigts, enlever éventuellement une calcinose gênante, etc. Ce sont des actes spécialisés pour lesquels une consultation d’orthopédie spécialisée dans les mains et les pieds est précieuse.

Autour de l’appareil digestif

Les troubles du système digestif font-ils partie des symptômes qui apparaissent dans les cinq premières années de la maladie, peuvent-ils se déclarer plus
tard ?

Les symptômes digestifs peuvent être les premiers à être présents, avant même que la sclérodermie ne soit diagnostiquée. Par exemple, des patients peuvent avoir été opérés pour un reflux gastro-œsophagien et cela n’a pas marché, c’est alors que l’on découvre une sclérodermie. D’autre part, certains patients vont développer très tardivement, après 10 ou 15 ans, certains symptômes qui apparaissent très tôt en général, comme la pseudo-obstruction chronique (constipation, puis fortes diarrhées). L’atteinte ano-rectale quand à elle, est plutôt tardive. C’est pour cette raison qu’il est important de poser toujours les mêmes questions aux patients qui sont suivis pour la sclérodermie depuis plusieurs années.

Que faire en cas de brûlures d’estomac ou de l’œsophage ?

Les douleurs épigastriques (au creux de l’estomac), les liquides acides dans la bouche, le reflux gastro-œsophagien sont des conséquences classiques de la sclérodermie. Avec les traitements (Mopral°, Motilium°, et hygiène alimentaire) adaptés, il est évident que les choses vont mieux et on voit beaucoup moins des ulcères au niveau du bas de l’œsophage. Il n’y a pas de raison pour que cela ne se stabilise pas. Il existe une intervention sur l’œsophage pour améliorer la continence, mais elle est très difficile quand la sclérodermie est en cause. Les traitements anti-acides permettent d’améliorer généralement la situation sans que l’opération soit nécessaire.

Peut-on intervenir chirurgicalement sur le béance du cardia (entrée de l’estomac) ?

Oui , cela est techniquement possible, soit par une intervention chirurgicale classique, soit sous cœlioscopie, soit par voie endoscopique. Mais, il faut savoir que cette opération consiste à fermer le cardia par une suture qui plie l’estomac autour de l’œsophage ; si la motricité de l’œsophage est normale, cela est très efficace sur le reflux, mais si (comme c’est le cas dans la sclérodermie) la motricité est insuffisante voire absente, il y a un risque d’obstruction et donc de gêne à la descente du bol alimentaire. C’est la raison pour laquelle la majorité des spécialistes considèrent que la chirurgie du cardia est contre-indiquée chez les sclérodermiques

Avec une sclérodermie, peut-il y avoir une Cirrhose Primitive Biliaire associée ?

Concernant l’association d’une CBP à une sclérodermie localisée, les chiffres très faibles. On peut se demander s’il ne s’agit pas d’une coïncidence. En tous cas si au cours de la sclérodermie localisée on connaît des manifestations auto-immunes diverses, il faut rappeler que l’évolution vers ou l’association avec une forme systémique de sclérodermie est rare. La fréquence d’association d’une morphée et d’une sclérodermie systémique est de l’ordre de 1 cas sur 700, selon la plus grande étude publiée.

La cirrhose biliaire primitive (CBP) fait partie des maladies auto-immunes, dont on connaît l’association possible avec la sclérodermie systémique. Le nom de « syndrome de Reynolds » a même été donné à cette situation clinique particulière. Bien que rare, c’est une occurrence classique, qui concerne environ 5% à 7% des sclérodermies systémiques.

Comment se fait le diagnostic ? Dans le cas où il y a une suspicion, il est nécessaire de mettre en place une surveillance avec des analyses régulières du bilan hépatique et une surveillance annuelle, le diagnostic peut nécessiter une IRM hépatique, voire une biopsie du foie.
Dans le cas où l’hépatologue consulté ne connaît pas la sclérodermie, que faire ? Il faut alors, mettre en relation le médecin qui suit régulièrement le malade et qui connaît la maladie avec l’hépatologue. Dans une maladie protéiforme comme la sclérodermie, les approches multi-disciplinaires sont fondamentales.

A l’heure actuelle nous ne disposons pas d’un traitement unique utilisable pour guérir ces maladies, mais la sclérodermie a des traitements connus, et la CBP peut bénéficier de traitements spécifiques, parmi lesquels l’acide ursodésoxycholique.

Que faire en cas de constipation ?

La fréquence normale des selles est entre 2 par jour et 2 par semaine. La sclérodermie systémique ralentit souvent le transit. Les moyens disponibles pour corriger cela incluent :

– les « ballasts », éléments alimentaires capables de donner à l’intestin des résidus non digérables qui facilitent la motricité du côlon et tendent à donner des selles plus molles et abondantes : mucilages (ex. Spagulax° 1 à 2 sachets par jour) et son de blé (sous forme quelconque, ce qui compte c’est la dose : 5 à 10 grammes par jour).

– le polyéthylène glycol ou macrogol, macromolécule utilisée pour préparation des endoscopies coliques qui existe en petits sachets (TransiPEG°, Forlax°, etc…) et  attire de l’eau dans les selles de façon atoxique pour l’intestin.

– les produits qui augmentent la motricité de l’intestin comprennent la trimébutine, l’érythromycine à petite dose, la pyridostigmine et d’autres prokinétiques: à prescrire par un médecin.

– les autres laxatifs sont à déconseiller, car ils sont souvent irritants.

Que faire en cas de diarrhée chronique ?

Elle doit faire suspecter une atteinte intestinale. Elle est le plus souvent due à un syndrome de malabsorption en rapport avec une pullulation microbienne. De fait, une consultation avec un médecin est nécessaire avec : analyses, manométrie de l’intestin grêle, mesure de l’atteinte conditionnant le traitement.

D’où viennent les douleurs abdominales ?

Cela peut avoir des origines différentes comme des spasmes coliques, des épreintes, des douleurs liées aux troubles du transit , des douleurs nerveuses, etc.., il faut aller consulter le médecin, lui décrire tous les symptômes, faire un bilan et savoir à quoi correspondent les manifestations.

Qu’est-ce que l’estomac pastèque ?

L’estomac pastèque est bien connu dans la sclérodermie systémique : il s’agit de dilatations des petits vaisseaux de la muqueuse de l’intérieur de l’estomac ; il est à l’origine de saignements et d’anémie. On peut procurer des suppléments de fer pour permettre à la moelle de compenser ; un traitement endoscopique par laser permet de coaguler les vaisseaux qui saignent.

Comment expliquez vous l’incontinence anale ?

Elle est due à une incompétence des sphincters qui contrôlent l’évacuation des selles ? L’examen qui permet d’apprécier l’atteinte anale est la manométrie ano-rectale. La rééducation par biofeedback est le plus souvent efficace. Il en est de même pour l’incontinence urinaire.

Qu’est-ce qu’une manométrie de l’intestin grêle ?

Enregistrement de l’activité de l’intestin grêle sur 5 heures ou 24 heures, non douloureux. Un petit tube qui passe par la gorge jusqu’à l’intestin après anesthésie des fosses nasales et de la gorge.

En quoi consiste le traitement par neurostimulateur pour incontinence anale ?

il y a 2 types de neuromodulation :

– la neuromodulation cutanée au niveau de la jambe (nommée TENS), de réalisation facile, stimulateur externe raccordé à 2 électrodes cutanées autocollantes, mais non encore validée dans la prise en charge de l’incontinence anale, mais “réalisable”.

-la neuromodulation des racines sacrées, validée , et qui repose sur un stimulateur implantée au niveau de la fesse raccordé à une électrode trans sacrum : cela se réalise en 2 temps au bloc opératoire. Le 1er temps étant un test de 3 semaines pour juger l’efficacité avant implantation définitive. ce dispositif nécessite une évaluation fonctionnelle précise et une validation par une réunion multidisciplinaire ( Haute Autorité de Santé 2009).

Quelle est l’atteinte de l’œsophage ?

L’œsophage est paralysé dans sa moitié inférieure par la sclérodermie, d’où un reflux de liquide de l’estomac vers l’œsophage et la bouche qui peut donner une inflammation (œsophagite) voire des ulcères œsophagiens, lesquels peuvent se compliquer de rétrécissement (sténose) qui provoque une gêne à la déglutition (dysphagie) notamment pour les solides comme le pain, la viande. L’endoscopie montre bien ces lésions et débouche sur des traitements anti-acide et anti-reflux qui sont généralement efficaces.

Existe-t-il un blocage de l’estomac dans la sclérodermie ?

Un blocage de l’estomac est très rare au cours de la sclérodermie ; on sait que celle–ci peut ralentir les mouvements de l’estomac (bradygastrie), mais le plus souvent les aliments arrivent à passer. Il faut donc évoquer une possible complication et en particulier la formation d’un tas de débris alimentaires compactés appelé bezoar. Cela forme une plus ou moins grosse boule dans l’estomac qui bloque sa fonction et peut empêcher le passage des aliments. Je crois donc justifié de faire, soit une endoscopie, soit une radiographie de l’estomac pour chercher une telle anomalie (l’endoscopie a l’avantage de décrire aussi si l’estomac présente un ulcère, des télangiectasies ou autre chose, et de voir directement quelle est sa mobilité). Pour la bradygastrie l’augmentation des doses de motilium ou l’adjonction d’un autre prokinétique (métoclopramide, trimébutine, érythromycine, pyridostigmine) sont possibles.

Quel régime alimentaire adopter ?

Du point de vue intestinal, compte tenu des carences en nutriments, oligo-éléments et vitamines, il faut prévenir la dénutrition en association avec les médicaments. Un suivi par un médecin et une diététicienne est indispensable.

Le manque d’appétit est souvent pris au sérieux dans la sclérodermie car il peut entraîner une dénutrition et il faut rester vigilant. Essayez de fractionner vos repas en plusieurs prises et en petites quantités pour ne pas surcharger l’estomac. Varier vos menus, manger ce qui peut vous faire plaisir. Compte tenu que la contractilité est moins bonne, vous pouvez aussi utiliser les médicaments comme le dompéridone ou l’érythromycine qui, bien qu’étant antibiotique, a un rôle pour aider à la propulsion du bol alimentaire.

Il faut privilégier les régimes riches en fibres, mais sans excès pour éviter les gaz. Le mieux est de manger de tout mais avec modération, en quantité équilibrée. Il existe des phénomènes de mode dans l’alimentation, sans lactose, sans gluten, sans fructose, sans FODMAPs (hydrates de carbone à chaîne courte)… Derrière ces comportements alimentaires se cache souvent une dimension psychologique ; une étude a démontré que 50% des personnes dites intolérantes au lactose ne le sont pas, cependant ce sont ces personnes qui somatisent le plus. Nous retrouvons ici la notion d’intéroception (beaucoup de personnes peuvent avoir des symptômes liés à l’alimentation, cela ne signifie pas pour autant que l’aliment soit responsable de ces symptômes, mais simplement ces personnes peuvent avoir un terrain d’hypersensibilité dans leur tube digestif et l’information qui arrive au cerveau par la périphérie est alors anormalement captée).

Comment gérer les problèmes de constipation suivie de diarrhée ?

L’atteinte digestive dans la sclérodermie est un vrai problème. La sclérodermie peut toucher le système nerveux autonome, qui commande en automatique les mouvements de l’intestin ; quand vous mangez, vous pensez à mastiquer et à avaler, puis vous oubliez la suite et ce qui se passe à l’intérieur repose sur cet automatisme.
Il y a dans l’estomac et intestin, un système qui fait avancer toute seule la digestion et les aliments avancent dans le circuit afin qu’ensuite, ils soient digérés et assimilés. Dans l’intestin, on vit en équilibre avec des millions de microbes, appelés ” la flore intestinale ” qui travaille avec notre organisme à la digestion. Cet équilibre est relativement fragile et si le mouvement de l’intestin n’est pas correct, les microbes profitent de la stagnation du liquides dans l’intestin, ils prolifèrent et fabriquent du gaz.

Dans la sclérodermie, malheureusement, l’atteinte du système nerveux automatique fait que le transit de l’intestin avance moins vite, la progression des aliments dans l’intestin est ralentie par la sclérodermie. Certains microbes de la flore en profitent, pullulent et développent du gaz, provoquant des gonflements pouvant ballonner beaucoup les femmes sclérodermiques. Les gaz stagnent et on peut arriver à la sensation d’occlusion.
Ce phénomène se débloque ensuite et peut alterner avec des épisodes de diarrhées, où au contraire, les selles sont très liquides et, comme le système de continence avec la contraction du sphincter de l’anus est quelquefois déficient, les sclérodermiques ont beaucoup de mal à retenir leurs selles et cela peut représenter un vrai handicap.
Pour pallier le ralentissement du mouvement de l’intestin, on peut donner des médicaments appelés : pro kinétiques (dompéridone, trimébutine, Pyridostigmine, métoclopramide, érythromycine) et si tout cela ne suffit pas, il existe un médicament injectable : la somatostatine en injection sous la peau et qui fonctionne assez bien. Il faut l’injecter une à deux fois par jour, et cela relance le mouvement de l’intestin et permet que la digestion se fasse à nouveau, que le ventre soit moins gonflé et le transit plus normal.
A l’opposé, quand c’est la diarrhée qui s’installe, il y a un médicament très connu : imodium (nom chimique : lopéramide) qui permet de densifier les selles et de limiter la diarrhée et, une fois la consistance meilleure, la retenue peut-être facilitée.
Il faut donc arriver à jongler entre les différents médicaments en fonction de la situation : gaz, constipation ou diarrhée. Quelquefois, lorsque la flore intestinale prend trop d’amplitude, qu’il y a une pullulation microbienne et trop de gaz, on peut prendre une séquence d’antibiotiques (metronidazole, norfloxacine, amoxicilline, rifaximine, etc.) plus ou moins spécifiques des germes anaérobies et alterner les antibiotiques avec des probiotiques (Ultra levure, etc.) qui permettent de remettre une bonne flore à la place de la mauvaise.
Malheureusement, les sclérodermiques qui ont des troubles digestifs ont parfois tendance à restreindre leur alimentation et manquent alors de vitamines, de protéines, de glucides, de lipides et arrivent à maigrir trop ; il faut essayer de les traiter en prescrivant des compléments alimentaires (Renutril, remboursé), et proposer une consultation avec un diététicien, un nutritionniste ou un gastro-entérologue pour aider à trouver le bon équilibre entre les médicaments et les compléments alimentaires.

Quels sont les examens à réaliser en cas d’atteintes des intestins ?

Prises de sang, examen d’imagerie, Breath test au lactose qui permet de souffler dans un petit tuyau avant et après la prise de glucose (sucre). Si la quantité de méthane contenue dans le gaz expiré est importante, cela peut être le signe d’une pullulation microbienne, d’une malabsorption, etc. Différents traitements peuvent être mis en place comme l’injection quotidienne de prokinétiques pour aider à la contractilité.

Quel est l’intérêt du massage abdominal ?

Les massages abdominaux sont pratiqués fréquemment dans le syndrome de l’intestin irritable, dans la colopathie fonctionnelle dans les douleurs abdominales, les ballonnements et dans les manifestations digestives de la colopathie. Il y a plusieurs effets bénéfiques à les pratiquer, notamment un effet relaxant, car le fait de toucher le ventre est une technique de relaxation en quelque sorte qui modifie l’intéroception (la façon dont on se perçoit). Par exemple, lorsque l’on est anxieux ou dépressif ou que l’on a une mauvaise image corporelle, toutes les informations qui vont arriver de notre corps (par la peau, les tendons, les muscles, les viscères…) vers notre cerveau, vont être mal interprétées par celui-ci. Le massage agit également sur le diaphragme, sur la composante pariétale de l’abdomen ce qui a un effet relaxant. Toutes ces techniques complémentaires ou alternatives peuvent modifier l’information qui va vers le cerveau et inversement la perception par le cerveau peut avoir un impact sur le ressenti physique. Ces techniques peuvent être très intéressantes surtout lorsque les médicaments ne donnent pas les résultats escomptés.

Le fait d’avoir un anneau gastrique peut-il être un inconvénient dans la sclérodermie notamment pour l’estomac et l’œsophage ?

Oui, car le but de cette technique est de réduire la taille de l’estomac. Cependant, il peut y avoir des personnes qui ont eu la pose d’un anneau gastrique alors qu’elles avaient à ce moment une sclérodermie infra-clinique (qui ne provoque pas de manifestations décelables lors de l’examen) ou qui ont développé une sclérodermie ultérieurement. Par ailleurs, il est arrivé que des personnes aient subi un montage antireflux dans le cadre d’un reflux gastro-œsophagien alors qu’elles étaient atteintes de sclérodermie. Ce type de situation ne devrait pas se produire, car dans le cas de cette intervention, il est nécessaire de procéder à diverses explorations (manométrie œsophagienne, PH-métrie œsophagienne, motricité, acidité, étudier la vidange de l’estomac…) et après seulement on propose une chirurgie.

Quels sont les effets secondaires des IPP à long terme ? Faut-il faire des des examens de contrôle régulièrement ?

Les IPP arrangent les symptômes de reflux, mais ils favorisent les pullulations microbiennes, on les associe alors souvent à un prokinétique qui accélère la digestion. Il faut essayer de donner la dose minimale efficace et contrôler par endoscopie pour voir si l’œsophage a cicatrisé, voire faire un enregistrement de l’acidité : est-ce que l’acidité est couverte complétement ? Ce n’est pas parce que l’on a pas d’œsophagite que l’on n’a pas de reflux.

Des études ont démontré cependant qu’il est possible de prendre des IPP au long cours dans le cas de reflux classiques, mais le problème, c’est que dans la sclérodermie, il existe une atteinte diffuse ce qui n’est pas anodin, car cela favorise les pullulations et il y a aussi d’autres complications comme l’ostéoporose. Il s’agit par conséquent de trouver un juste milieu. Le problème étant que les patients deviennent bien souvent IPP dépendants et qu’ils refluent dès qu’ils arrêtent les IPP d’autant plus si le reflux n’est pas traité, cela n’est pas bon non plus pour les poumons.

Il est préférable de les répartir en deux prises : matin et soir et de les prendre avant les repas. Théoriquement, un IPP doit couvrir 24 heures, ce qui n’est pas le cas pour les sclérodermiques, car nous sommes simplement dans une physiopathologie complètement différente du simple reflux classique. Parfois, on peut ajouter au moment du coucher des antihistaminiques H2 pour bloquer les récepteurs de l’histamine de type 2 qui jouent plus sur l’acidité nocturne. En principe, je donne toujours des IPP en double dose car je vois rarement des personnes qui ne supportent pas les IPP à 20 mg, souvent cela ne suffit pas, c’est soit 20 mg matin et soir, soit 40 mg matin et soir.

Autour des poumons

Comment faire pour prévenir les infections avec une maladie pulmonaire ou d’une fibrose pulmonaire dans la sclérodermie ? 

Le meilleur moyens pour limiter les infections lorsqu’on a une maladie pulmonaire est de faire les vaccinations obligatoires et importantes : 

  • vaccination contre la grippe tous les ans
  • vacination contre le pneumocoque tous les cinq ans

Je suis atteint d’une sclérodermie systémique de forme cutanée limité. Depuis environ 4 ans, j’ai commencé à être essoufflé, modérément au début, mais maintenant, je peine à marcher, à monter un étage. Même la nuit, le souffle me manque et avec l’effort, j’ai une douleur dans la poitrine et ensuite dans le dos.

En principe, l’essoufflement justifie de réaliser des épreuves fonctionnelles respiratoires qui doivent quantifier le déficit de la fonction de ventilation. Si celles-ci sont anormales, d’autres examens peuvent être faits pour élucider la cause du problème. Une vérification du taux d’hémoglobine contenue dans les globules rouges du sang est aussi opportune.

Chez les sclérodermiques, il y a fréquemment des atteintes du tissu pulmonaire, ou des vaisseaux pulmonaires, ou du cœur, ou une anémie liée aux saignements digestifs par exemple.

Il arrive que la sclérose de la cage thoracique gêne la ventilation. Tous ces problèmes doivent être documentés par des examens appropriés avant d’être traités. Dans le cas contraire, il s’agit d’une impression d’étouffement qui peut être liée à l’angoisse ou à d’autres problèmes psychologiques.

Peut-on faire un lien entre embolie pulmonaire et sclérodermie ?

Il n’y a aucun rapport entre la sclérodermie et l’embolie pulmonaire, sauf si cette dernière est due à des anticorps antiphospholipides qui sont une complication possible de toutes les maladies auto-immunes.

Cela est facile à rechercher sur une simple prise de sang. En principe, sous traitement anticoagulant efficace, les caillots pulmonaires doivent se dissoudre en trois à six mois

Quel est le rôle exact de l’oxygénothérapie ?

Le rôle de l’oxygénothérapie est ultra simple: lorsque le poumon est malade (notamment lorsqu’il y a une fibrose ou une HTAP) il a du mal à transporter suffisamment d’oxygène de l’air inspiré vers le sang.

Donc on augmente la concentration d’oxygène dans l’air inspiré ce qui mathématiquement facilite ce transport. De plus, lorsqu’il y a un manque d’oxygène dans le sang, les vaisseaux pulmonaires tendent à se serrer, c’est ce qu’on appelle la “vasoconstriction hypoxique”.

L’administration d’oxygène supplémentaire lutte contre ce cercle vicieux, à condition qu’elle soit assez prolongée (plus de 12h par jour). Le débit d’oxygène est mesuré en litres par minutes, généralement on prescrit entre 1 et 6 litres / minute.

A-t-on aujourd’hui assez de recul pour évaluer la réussite de la greffe pulmonaire ?

Il y a aujourd’hui des publications émanant de centres spécialisés qui montrent des espérances de survie de 60% à deux ans après la greffe pulmonaire. Globalement, ce sont les mêmes chiffres que ceux indiqués dans la greffe pour d’autres maladies pulmonaires orphelines, que l’on ne sait pas traiter encore de manière satisfaisante.
Les indications doivent être posées avec beaucoup de précisions, éviter les malades qui ont d’autres maladies associées (en particulier le reflux gastro-œsophagien sévère ou l’insuffisance cardiaque grave), les traitements trop lourds, et les patients incapables de recevoir assez de médicaments. Mais, si les poumons sont très malades, il ne faut pas attendre que la maladie soit trop évoluée pour prendre la décision de greffe.
Je n’ai pas connaissance, de manière formelle, de cas de récidive d’hypertension artérielle après la greffe mais on peut voir apparaître de multiples complications vasculaires pulmonaires, des phénomènes de rejets de la greffe ou des problèmes avec la quantité de médicaments anti-rejets et autres.

Le test de marche de 6 mn est-il intéressant pour surveiller la sclérodermie au niveau d’une HTAP ?

Oui, dans certains cas ! Evidemment pour ceux qui sont en mesure de le réaliser correctement. Une grande partie des patients sclérodermiques présentent des problèmes locomoteurs ou articulaires et le test ne peut être pertinent, mais chez les patients jeunes ou ayant une déambulation plus satisfaisante même si elle limitée du fait de la sclérodermie, la réalisation du test de marche à 6 mois d’intervalle peut permettre d’avoir des paramètres fiables.

Le test de marche est reconnu par les pneumologues comme la référence dans l’évaluation de l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) ; cela consiste à faire marcher le malade pendant 6 mn, dans un couloir, en mesurant combien de distance il peut parcourir et on surveille si l’oxygénation du sang reste correcte.
Classiquement, les pneumologues font cela avec une surveillance de l’oxygénation du sang par un petit capteur au bout d’un doigt, mais dans la sclérodermie, ce n’est pas possible avec le phénomène de Raynaud et cela est vrai pour l’oxymétrie nocturne (recherche de désaturation), il faut absolument refuser la pince au bout du doigt pour tous les sclérodermiques, car les résultats peuvent être faussés d’une part et d’autre part, cela est douloureux et peut même favoriser une ulcération digitale pour le ou la malade. Il est donc préférable de faire les tests avec capteur frontal, et pas sur le bout du doigt ni sur le lobe de l’oreille.
Le test de marche est très valable pour les gens qui ont juste le poumon malade et rien d’autre, mais dans la sclérodermie, il peut y avoir beaucoup d’éléments qui peuvent entraver le bon fonctionnement de ce test : calcinoses sous les pieds gênant la marche, problèmes d’articulation, de muscles, etc.
C’est un test qui peut être réalisable, mais il évalue en fait de façon globale tous les éléments de la maladie sclérodermique limitant la marche, pas seulement l’état pulmonaire.

Est-ce que l’HTAP est plus fréquente chez les patients sclérodermiques ?

L’HTAP reste une complication rare de la maladie (5 à 10%), il était constaté qu’elle arrivait majoritairement dans les 10-15 premières années de la forme limitée de la sclérodermie systémique. Le message à faire passer est un dépistage le plus tôt possible d’où l’intérêt de faire tout les ans le bilan avec examens cliniques (essoufflement ?), marqueurs sanguins cardiaques, EFR et écho cardio. Si suspicion, le cathétérisme cardiaque s’impose, il permet de confirmer (ou non) un diagnostic d’HTAP. Cela peut arriver au début de la maladie, mais cela reste rare.
Il ne faut pas craindre le cathétérisme cardiaque et faire confiance au médecin qui le propose, surtout s’il y a le moindre doute, car c’est la seule façon de rassurer quant à l’absence d’hyper-pression pulmonaire ou la nécessité de mettre en place un traitement adapté (aucune décision ne peut être prise sans cathétérisme).

Autour des muscles et des articulations

Comment faire la différence entre les douleurs articulaires et la fibromyalgie ?

L’examen clinique est très différent, la fibromyalgie touche les zones d’insertions tendineuses et non directement l’articulation, si l’examen clinique n’est pas suffisant, les examens d’imagerie montreront précisément s’il existe ou non une atteinte articulaire (dans la fibromyalgie, absence d’atteinte du cartilage, pas de gonflement de la synoviale….) 

Comment expliquer les douleurs articulaires ? Comment les traiter (autrement que par la cortisone) ?

Il s’agit de douleurs des tendons, des synoviales ou des ligaments, structures qui ne se voient pas sur les radios. C’est une source de gène importante dont le mécanisme n’est pas univoque. Les douleurs peuvent provenir de véritable arthrite (proche des autres polyarthrites), d’atteinte osseuse fortement suspectée d’être d’origine vasculaire (nécrose de l’os comme la nécrose des doigts), de calcifications avec réaction inflammatoire (calcinose), de tendinites souvent très particulières.

La première orientation vient de la clinique puis l’imagerie peut aider, radiographies simples voire ECHO ou IRM selon les cas de figures.

Puis, bien sûr le traitement est à discuter en fonction de ces différentes données et peut appeler des molécules très différentes selon les mécanismes suspectés. Seul un avis spécialisé peut amener un traitement approprié à chaque malade.

Les crampes sont-elles rapport avec la sclérodermie ?

Les crampes sont regroupées dans les douleurs musculaires. Ce n’est pas exceptionnel dans la sclérodermie. La physiopathologie des crampes est extrêmement complexe, compliquée. Il peut y avoir plusieurs causes comme les troubles métaboliques, le manque de magnésium, de calcium ou des pathologies musculaires.

Peut-on utiliser l’acide hyaluronique ?

L’infiltration d’acide hyaluronique se fait pour améliorer le fonctionnement d’une articulation douloureuse et inflammatoire. C’est un geste spécialisé qui doit être fait par un professionnel dans le respect strict des règles d’asepsie. L’effet bénéfique sur l’arthrose (usure de l’articulation, souvent compliquée d’inflammation) est retardé, généralement quelques semaines à quelques mois, et entraîne une économie d’hospitalisations. Il s’épuise en six mois. L’acide hyaluronique de haut poids moléculaire (Hylan°) disponible dans certains pays n’apporte pas d’avantage par rapport à l’acide hyaluronique standard (Hyalgan°). Les effets secondaires sont réduits, et avec une bonne technique d’asepsie le taux d’infection est de l’ordre de 1 pour 10 000. On n’a pas de littérature pour documenter l’effet dans la sclérodermie. Donc la ou les infiltration(s) d’acide hyaluronique dans une localisation de sclérodermie à la cheville doit être considérée comme atypique et réservé à des cas d’exception. Est-ce risqué ou pas ? NON pour les lèvres.

Que faire en cas d’algodystrophie ?

L’algodystrophie est difficile à traiter mais guérit toujours quant à elle. De la physiothérapie (bains, chauds, froids, …) sont souvent proposés en phase chaude, un traitement par bisphophonates est aussi souvent proposé en phase chaude également, parfois d’autres traitements donnés en rhumatologie ou dans des centres de la douleur (kétamine…) mais selon les stades évolutifs.

Articulations et sclérodermie.

Les articulations sont souvent douloureuses (les médecins appellent cela arthralgies) mais peuvent être carrément enflammées (ce sont alors des arthrites) ; cela peut toucher une seule articulation (mono-) ou un petit nombre (oligo-) ou un grand nombre (polyarthrite). Les polyarthrites sclérodermiques siègent souvent aux racines des doigts comme dans d’autres connectivites, elles sont symétriques et ciblent volontiers les articulations des doigts sur les mains (métacarpophalangiennes). Une telle inflammation se traite par anti-inflammatoires, médicaments immuno-modulateurs et anti-douleurs.

Les myalgies ont-elles un rapport avec la sclérodermie ?

Des douleurs musculaires appelées myalgies sont très fréquentes et vont souvent de pair avec les douleurs articulaires et tendineuses. Elles ne sont pas graves et ne vont pas perturber le fonctionnement ou la force du muscle. A ce stade, seuls des antalgiques, voire ponctuellement de petites doses d’anti-inflammatoires non-stéroïdiens, peuvent être proposés.

Existe-t-il un risque de myosite ?

Il existe par contre une complication musculaire inflammatoire appelée myosite, rare (environ 5% des cas) au cours de la sclérodermie systémique, avec de possibles douleurs, mais surtout une faiblesse avec perte de force (incapacité à monter les escaliers ou à se lever sans s’aider des bras d’une chaise par exemple). Les myosites surviennent en règle générale au cours des premières années d’évolution de la sclérodermie systémique, plus fréquemment dans les formes diffuses et œdémateuses de la maladie. Rarement, l’atteinte musculaire peut intéresser les muscles de la déglutition et entraîner des fausses routes. Biologiquement, il existe le plus souvent une élévation des enzymes musculaires, les créatine phosphokinases (CPK), détectée sur la prise de sang. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) va montrer des zones inflammatoires dans les muscles. Une biopsie peut être nécessaire et cette situation est une des rares où l’on conseille alors d’utiliser les corticoïdes de façon transitoire en association à un traitement de fond, le plus souvent du méthotrexate.

Depuis quelque temps, j’ai une aponévrosite au talon (apparemment il s’agit d’une sorte de tendinite). Est-ce que cela a un rapport avec la sclérodermie ?

L’aponévrosite, ou inflammation du coussinet plantaire, n’est pas un signe particulièrement lié à la sclérodermie. Dans les formes sévères et traînantes, on peut être amené à rechercher un autre rhumatisme associé. Il faut par contre se méfier de certains médicaments qui peuvent induire des tendinites : antibiotiques (famille des quinolones utilisés dans les infections urinaires), hypocholestérolémiants…
Le plus souvent, il s’agira d’une atteinte mécanique, qui justifie des moyens locaux (talonnette) et ultrasons.

J’ai des douleurs sous les pieds lors de la pression du pied sur le sol, à quoi cela est dû ?

La consultation d’un spécialiste ou d’un podologue devrait aider à faire un diagnostique, lequel commandera le traitement. Dans la sclérodermie, il peut survenir des calcinoses plantaires douloureuses, des inflammations des articulations (arthrites) ou tendons (tendinites) voire des gaines de glissement (bursites) des pieds ; il peut arriver aussi une statique des pieds et un effondrement de l’arche antérieure des têtes des métatarsiens qui est la conséquence la plus courante. Cela donne un durillon d’appui à l’aplomb des 2ème et 3ème métatarsiens. Parfois, cela comprime le nerf entre les deux avec des douleurs électriques qu’on appelle maladie de Morton. Une semelle spéciale avec une barre d’appui en arrière de la tête des métatarsiens est utile pour remettre le pied en bonne position.

Y a-t-il une atteinte des tendons ?

Pour l’atteinte des tendons, qui fait partie de la maladie, des traitements et une kinésithérapie sont utiles. Le Plaquénil° est le traitement de base, couplé aux anti-douleurs et si besoin aux anti-inflammatoires (dont il faut surveiller la tolérance par l’estomac, l’intestin et les reins). Le Méthotrexate° et le Cortancyl° sont deux traitements renforcés possibles qui sont efficaces, mais qui demandent des précautions complémentaires. Les lancements dans les doigts et les joues font partie de la maladie. Le pronostic des atteintes tendineuses est généralement assez bon sous traitement, mais il faut bien appliquer la kiné pour limiter les ankyloses (il y a un risque de rétraction ou de perte de mobilité).

Je suis atteinte de douleurs palindromiques et je voudrais savoir s’il y a un rapport avec la sclérodermie ?

Qu’est-ce qu’une douleur palindromique ? Nous connaissons le rhumatisme palindromique qui est caractérisé par des douleurs brèves, qui se déplacent, qui durent quelques jours puis disparaissent complètement. Il est classique de constater que cela que cela peut évoluer vers une maladie comme la polyarthrite rhumatoïde.
Pour cette malade, cela pourrait être une forme débutante d’un rhumatisme inflammatoire indépendant ou associé à la sclérodermie, il faut surveiller cliniquement, biologiquement voire radiographiquement l’évolution pour définir si à un moment cet état “pré-pathologique” évoluera vers une forme plus complète de rhumatisme.

La polyarthrite peut-elle être associée à une sclérodermie systémique ?

C’est une des problématiques de l’atteinte articulaire. Il peut y avoir deux cas : soit c’est une association entre la sclérodermie et une polyartrique rhumatoïde, soit c’est la sclérodermie qui apporte une polyarthrite.
Au niveau de la thérapeutique, il y a des traitement symptomatiques de forme non-stéroïdienne qu’on essaie quand même d’éviter à cause de leur toxicité digestive qui ne fait pas bon ménage avec la sclérodermie. L’autre traitement symptomatique, c’est la cortisone, à utiliser également avec prudence et à faible dose (à forte dose elle est suspectée de pouvoir entraîner des problèmes d’hypertension et de crise rénale). A petites doses, elle peut être intéressante pour réduire l’inflammation et les douleurs ! L’intérêt c’est d’associer à ces traitements, un traitement- de fond, mais sans vraiment d’études spécifiques à la sclérodermie systémique ou de recul, on utilise le traitement de la polyarthrique rhumatoïde, le Méthotrexate ® (par voie sous-cutanée plutôt que par comprimé pour une meilleure absorption digestive). Ce traitement permet de réduire la prise de corticoïdes et on pense qu’il peut y avoir d’autre effets en particulier sur la peau).

Quand on a mal aux articulations et que l’on n’a pas pu réagir au traitement de fond, que reste-t-il comme traitement ?

Nous sommes contre les ainti-inflammatoires que ce soit des anti-inflammatoires AINS (non stéroïdiens) ou non corticoïdes, car ils sont toxiques pour tout le tube digestif. Ils aggravent les troubles œsophagiens. De plus, il y a un cycle ntéro-hépathique, (c’est-à-dire que de l’intestin grêle, ça va vers le foie, vers la bile, vers le tube digestif, puis c’est absorbé) ; d’une part, ça augmente la perméabilité intestinale, cela favorise, les translocations bactériennes (passage de bactéries du tube digestif vers les organes à distance par le biais des ganglions mésentériques) a fortiori s’il y a pullulation.

Concernant la douleur, il faut préciser aussi que la douleur constitue un stress et que le stress augmente la douleur. Les douleurs chroniques peuvent entraîner une modification des voies de la douleur qui font que l’on ne va plus “tamponner” sa douleur, mais développer une hyper sensibilité centrale. Au bout d’un moment, il y a un phénomène de chevauchement et l’on se pose la question de savoir, si c’est la maladie qui évolue ou si c’est le stress induit par la maladie ou l’environnement qui accentue la douleur.

Lorsqu’il y a des douleurs articulaires inflammatoires, avec un déverrouillage le matin, avec éventuellement des gonflements, des synovites (des douleurs quand on appuie, donc polyarthrites), on est contraint alors de donner de faibles doses de corticoïde. On peut y associer le méthotrexate comme dans la polyarthrite rhumatoïde (on le prend toutes les semaines avec, en plus des vitamines). Cependant, il arrive que ces corticoïdes aient du mal à soulager les douleurs, même à une dose de 10 mg, c’est à ce moment-là que l’on peut envisager une thérapeutique un peu plus agressive, soit de changer d’immunosuppresseur ou de tester des biothérapies. On n’utilise pas des Anti TNF qui ne semblent pas avoir d’effets intéressants dans la sclérodermie, mais plutôt le Rituximab qui est un anticorps qui cible le lymphocyte B. Bien qu’il n’ait pas été démontré qu’il fasse du bien, il peut néanmoins aider à contrôler l’atteinte articulaire inflammatoire chez certains malades. Bien qu’il soit en général utilisé lors d’un essai thérapeutique, on peut également l’utiliser le Tocilizumab, qui bloque l’action des récepteurs de l’interleukine 6.

Si la question est : Si l’on a été au bout de tout cela et qu’il y a toujours une atteinte articulaire sévère, que doit-on faire ? Dans ce cas, il est nécessaire de revenir aux fondamentaux, à savoir, s’assurer que l’on est bien face à une sclérodermie isolée, que le patient n’a pas autre chose comme la goutte, la chondrocalcinose articulaire, qui sont des maladies fréquentes, mais qui se traitent de façon différentes. Par ailleurs, il peut y avoir d’autres maladies articulaires intriquées avec la sclérodermie, telle que la polyarthrite rhumatoïde. Si l’on a rien trouvé d’autre, à ce moment-là on a recours aux immunosuppresseurs, mais on évite de donner des anti-inflammatoires non stéroïdiens, car ils auront des effets secondaires difficilement acceptables dans la sclérodermie. C’est un peu au cas par cas, on reprend le dossier, on en discute, on change d’immunosuppresseur, on peut donner de l’azathioprine par exemple. Il arrive aussi que l’on fasse quelquefois uniquement des infiltrations lorsque c’est juste une articulation qui fait souffrir.

Lorsque l’on a de l’ostéoporose et des calcinoses, quel traitement doit-on privilégier ?

L’ostéoporose est un peu plus présente auprès des patients atteint de sclérodermie que dans le reste de la population. Les facteurs expliquant cela ne sont pas encore très bien compris. Peut-être que certains médicaments tels que les IPP ou les troubles digestifs, pourraient favoriser cela. Une chose est sûre, c’est que les traitements que l’on peut proposer dans l’ostéoporose sont différents de ceux proposer pour les calcinoses, mais il n’a pas été démontré, à ma connaissance, que les traitements de l’ostéoporose aggraveraient les calcinoses. Dans ce cas-la, cela relève d’un médecin rhumatologue (spécialiste des os) qui fera du cas par cas et il adaptera son traitement en fonction de l’historique médical du patient. Il disposera à cet effet de 5 alternatives de traitement et s’il est avéré que l’une d’elle aurait une incidence sur les calcinoses, il pourrait alors changer son traitement

Comment faire de la rééducation, de la kinésithérapie lorsqu’on a mal dans les muscles, les articulations, etc. ?

On est complètement persuadé de l’intérêt de l’approche rééducative dans le traitement des douleurs chroniques. La reprise de la rééducation fonctionnelle est essentielle, soit avec l’aide d’un kinésithérapeute, soit par l’activité sportive personnelle, qui est recommandée et dans ce cas-là, il est important dans le cadre de l’éducation thérapeutique, d’aider le patient à gérer ses médicaments antidouleurs en fonction de l’activité physique.
Il est donc conseillé aux patients de prendre un antalgique dosé à 1 g, une demi-heure à une heure avant l’effort. Une ordonnance de rééducation faite à l’intention du kiné peut également comporter la prescription de la prise d’un antalgique avant les séances..